Remettre à plus tard. Un "plus tard" qui se transforme en un autre "plus tard". Et ainsi de suite. La procrastination est un phénomène largement répandu. C'est la tendance à remettre à plus tard l'accomplissement de tâches qui devraient être effectuées immédiatement, malgré la conscience de leur importance et de leur urgence. Et c'est bien en cela que ce comportement est tant redouté !

Cela peut être un comportement occasionnel pour certains, mais pour d'autres, cela peut devenir un véritable problème, qui peut avoir des conséquences négatives sur leur qualité de vie et leurs performances personnelles et professionnelles. En effet, ces remises à plus tard finissent à terme par engendrer un stress, plus ou moins important, et surtout nous laisse avec le sentiment de ne pas accomplir nos objectifs ou nos responsabilités.

Dans cet article, nous examinerons différentes causes qui peuvent contribuer à ce comportement, à la fois internes et externes. Ainsi, en identifiant ces causes, vous pourrez identifier vos propres freins au déploiement de votre plein potentiel. Enfin, des leviers adaptés à chaque frein identifié vous seront proposés.  

Les mécanismes à l’œuvre dans la procrastination

Le cercle vicieux :

La procrastination est un phénomène complexe qui a été largement étudié par les professionnels de la psychologie car pour certaines personnes, elle peut constituer un sérieux problème. En effet, les conséquences de la procrastination peuvent inclure entre autres un stress accru, une baisse de la performance, un manque de confiance en soi et des problèmes relationnels. De même, elle peut entraîner de graves conséquences dans la vie quotidienne, notamment les sphères professionnelle et familiale.

"En suivant le chemin qui s'appelle plus tard, nous arrivons sur la place qui s'appelle jamais".

Sénèque

Elle est définie scientifiquement comme un comportement d'évitement volontaire et différé de tâches à accomplir malgré la conscience de leur importance et de leur urgence. C'est cet aspect qui est problématique pour les personnes souffrant de la procrastination.

En effet, elle est souvent associée à des sentiments de stress, d'anxiété, de culpabilité et de détresse émotionnelle, justement du fait que les personnes ont bien conscience de l'importance et de l'urgence des tâches à accomplir.

Les différentes sources à l'origine de la procrastination :

La théorie dans le domaine de la psychologie la plus répandue indique que la procrastination peut être induite par des causes internes (liées à la personne) et externes (liées à l'environnement).

Parmi les causes les plus souvent associées à la procrastination, on retrouve :

  • la peur d'échouer ou d'être jugé négativement : cela peut bloquer la personne à réaliser la tâche. 
  • Le perfectionnisme : la personne craint de ne pas être à la hauteur de ses exigences élevées, ce qui peut également freiner l'exécution de la tâche. 
  • Les difficultés de gestion des émotions : les personnes qui sont soumises à un stress intense peuvent remettre à plus tard les tâches qui les stressent, dans l'espoir que la pression émotionnelle s'estompe avec le temps. Cependant, cela ne fait souvent qu'aggraver le stress et la culpabilité à mesure que la date limite approche. 
  • Les difficultés à planifier et à prioriser les tâches : les personnes peuvent se retrouver débordées et incapables d'agir, ce qui les pousse à remettre à plus tard les tâches. 
  • les distractions externes telles que les réseaux sociaux, les jeux en ligne, ou les écrans peuvent également jouer un rôle important dans l'incapacité de l'individu à se concentrer sur la tâche à accomplir.

Cette liste correspond aux sources de procrastination les plus répandues et qui ont été identifiées par la recherche scientifiques en psychologie.

Il existe également d'autres sources qui peuvent être plus circonstancielles (comme par exemple la procrastination liée à une tâche particulière, ou un contexte spécifique), ou plus personnelles, individuelles (par exemple la procrastination associées à une croyance spécifique sur soi-même dans l'exécution de la tâche).

L'important reste d'identifier dans un premier temps la ou les sources de la procrastination (interne et/ou externe) pour pouvoir mettre en place la/les stratégies appropriée(s). En effet, il est possible de commencer à réduire la tendance à la procrastination en mettant en place de nouvelles habitudes et en développant de nouvelles stratégies.

Gardez bien à l'esprit que comme tout apprentissage, ce processus nécessite du temps et de la pratique régulière.

Vous trouverez ci-après des conseils pratiques que vous pouvez mettre en œuvre dans votre vie quotidienne et professionnelle. En fonction de la source de la procrastination, interne ou externe, vous trouverez des méthodes et stratégies adaptées.

Sources externes : clefs pratiques au quotidien

Celles-ci sont liées à notre environnement et aux facteurs extérieurs qui peuvent influencer notre capacité à accomplir nos tâches de manière efficace.

Pour travailler sur ces causes externes, vous pouvez utiliser cette méthodologie, basée sur trois stratégies à mettre en place consécutivement :

1. l'observation :

La première étape consiste à identifier clairement la source extérieure à l'origine de votre procrastination. Pour ce faire, vous pouvez tout simplement tenir une liste des tâches ou activités que vous avez tendance à procrastiner. Cette procrastination peut s'exprimer de deux façons différentes : soit vous n'initier pas du tout la tâche, vous la repousser sans cesse ; soit vous la commencer, mais vous ne parvenez pas à la finir : la procrastination s'exprime alors dans la poursuite de la tâche.

2. le choix des actions à mettre en place :

Une fois que vous avez identifier la cause externe, vous pouvez décider quelle mesure vous allez prendre pour la contrôler, ou la modérer, ou en limiter son impact.

3. la discipline :

Une fois votre choix fait, appliquez-le directement. Et surtout, avec régularité et constance. C'est pour cette raison que cette dernière étape fait appel à la discipline et non la motivation. La motivation pour arrêter de procrastiner, nombre d'entre nous l'avons, notamment en raison des conséquences négatives qu'elle implique. C'est surtout l’auto-discipline qui va vous permettre de dépasser la procrastination et d'exprimer dès lors votre plein potentiel. Votre décision a déjà été prise, à l'étape 2. Vous avez choisi et décidé des méthodes et mesures à mettre en place pour ne plus procrastiner.

Dès lors, quand la situation se présente, on ne décide plus ! On agit directement. Mettez en place vos mesure, agissez selon votre décision. Ce n'est plus le moment de décider si c'est pertinent ou pas. Ça l'est, vous l'avez déjà évalué et décidé. Maintenant actez avec constance. Cette compétence est un atout majeur, c'est la raison pour laquelle nous lui avons consacré un article complet.

Voyons maintenant ensemble quelques-unes des causes externes les plus courantes de la procrastination :

Les distractions

Elles sont l'une des principales causes externes de la procrastination. Les notifications constantes sur nos appareils électroniques, les réseaux sociaux, la télévision, les conversations bruyantes ou d'autres stimuli peuvent facilement détourner notre attention et nous empêcher de nous concentrer sur nos tâches. Lorsque nous sommes constamment interrompus, il devient difficile de rester concentré et productif.

Elles peuvent également nous "kidnapper". Qui n'a jamais été surpris (choqué) du temps qu'il venait de passer sur Tiktok, Youtube short ou IG ? Ces activités sont attrayantes et captivantes : il peut être difficile de s'en détourner pour choisir d'initier (et maintenir) une autre tâche, peut-être plus rébarbative ou moins satisfaisante. Dans ce cas-là, il peut être pertinent de visiter les paramètres du téléphone (ou de l'application) pour définir un temps d'utilisation. Oui, cela peut paraître infantilisant, mais c'est une stratégie extrêmement puissante. En effet, en coupant d'office l'application ou bien en popant une notification, cela ramène votre attention dans votre action, et vous invite à prendre une décision consciente sur ce que vous aller faire : continuer ou bien initier autre chose, une autre action ? Vous pouvez également utiliser des applications ou des sites web pour bloquer les distractions en ligne.

Toujours concernant les notifications, il est également important que vous repreniez le contrôle de vos outils : téléphones, ordinateurs, que ce soit au travail ou bien dans la sphère personnelle. Lorsque vous êtes au travail, concentré sur une tâche, être dérangé(e) sans cesse par les notifications d'un nouveau mail, ou des conversations sur les chat d'entreprise, cela peut facilement conduire à la procrastination : au lieu de rester concentrer sur notre tâche et la terminer, nous nous interrompons pour répondre à ce qui vient de poper. Et voilà, on remet à plus tard la poursuite de cette première tâche.

Concernant l'environnement, il peut être pertinent de trouver un fond sonore intéressant mais pas captivant. Cela peut être des bruits blancs ou marron, ou une musique de fond.

Voici un exemple :


La surcharge de travail

Lorsque nous avons une quantité excessive de travail à accomplir, nous pouvons être tentés de procrastiner. La surcharge de travail peut être écrasante, et nous pouvons avoir l'impression de ne pas pouvoir tout accomplir. Cette sensation de submersion peut nous pousser à remettre les tâches à plus tard, dans l'espoir de trouver un moment plus propice pour les aborder.

Ah, la fameuse montagne à gravir ! Voici quelques méthodes simples et efficaces que vous pouvez considérer pour endiguer le cercle vicieux :

  • décomposer les tâches en étapes plus petites et plus gérables. 
  • utiliser une technique de "Pomodoro" pour se concentrer sur une tâche pendant une courte période de temps prédéfinie. 
  • travailler en équipe ou demander de l'aide pour les tâches difficiles. 
  • déléguer certaines tâches, que ce soit sur le plan professionnel ou personnel. Il est important de prendre le temps de réfléchir à la répartition des tâches et leur organisation. 
  • se rappeler de prendre des pauses régulières pour éviter de se sentir surchargé et de générer un stress supplémentaire.

Pour plus de détails sur les outils pratiques, je vous invite à consulter l’article consacré aux outils de gestion du temps et de productivité. 


Le manque de ressources

Cela peut également être une cause externe de la procrastination. Il peut s'agir de ressources telles que le temps, l'argent, les compétences ou les outils nécessaires pour accomplir une tâche spécifique. Lorsque nous nous sentons limités par un manque de ressources, il est facile de reporter la tâche à plus tard, en espérant pouvoir réunir les ressources nécessaires ultérieurement.

Si vous avez identifier cette source externe, il est nécessaire de prendre le temps de réfléchir à comment vous pouvez contourner cette difficulté avant d'essayer de vous engager dans la tâche.

Bien que nous ne puissions pas toujours contrôler complètement notre environnement extérieur, nous pouvons prendre des mesures pour minimiser les distractions, organiser notre charge de travail de manière plus efficace. Encore une fois, il est nécessaire de prendre le temps d'identifier les sources de la procrastination, de les reconnaître, les analyser pour prendre des mesures appropriées afin de casser ce cercle vicieux.

Ce travail en amont d'auto-observation est un gain de temps essentiel : il vous permet de mieux connaître votre environnement et les facteurs déclencheurs ou de maintien de votre procrastination, pour pouvoir mettre en place des stratégies pertinentes et efficaces sur le long terme. Cette analyse initiale et la mise en œuvre concrètes de vos décisions vous permettront de libérer votre plein potentiel en limitant la procrastination.

 

Causes internes de la procrastination : 

Les causes internes de la procrastination sont profondément enracinées dans nos pensées, nos émotions et nos croyances personnelles. Comprendre ces causes internes est essentiel pour pouvoir les traiter et dépasser la procrastination. Voici quelques-unes des causes internes les plus courantes. 


La peur de l'échec

Elle est l'une des causes internes les plus courantes de la procrastination. Nous pouvons craindre de ne pas être à la hauteur, de faire des erreurs ou de ne pas atteindre nos propres standards. Elle peut ainsi correspondre à la crainte de décevoir les autres ou bien soi-même.

Voici quelques stratégies que vous pouvez mettre en place dès maintenant dans votre quotidien :

  • diviser la tâche en plusieurs étapes accessibles et atteignables. 
  • adoptez une approche progressive : commencez par des tâches plus faciles ou moins importantes pour accumuler des succès et gagner en confiance. En prenant l'habitude de terminer des tâches plus simples, vous vous sentirez plus capable de relever des défis plus importants par la suite. 
  • fixez-vous des objectifs SPORT. La méthode complète est détaillée dans cet article. 
  • trouvez du soutien : parlez de vos craintes et de vos objectifs à des personnes de confiance, telles que des amis, des membres de votre famille ou un coach. Ils peuvent vous apporter du soutien, des conseils et des encouragements pour vous aider à surmonter votre peur de l'échec. 
  • faites preuve de bienveillance envers vous-même : soyez aimable et compatissant envers vous-même, même en cas d'échec. Évitez de vous juger sévèrement et rappelez-vous que tout le monde fait face à des revers. Utilisez chaque expérience comme une occasion d'apprentissage et de croissance. En fait, cette attitude est même primordiale, essentielle, et pas uniquement dans ce contexte. Si vous souhaitez approfondir ce sujet, vous pouvez consulter également cet article.


Le manque de motivation

C'est également une cause interne de la procrastination. Lorsque nous ne sommes pas suffisamment motivés par une tâche ou que nous ne voyons pas son importance, nous avons tendance à la reporter indéfiniment. En effet, il nous est difficile de trouver l'énergie et l'enthousiasme nécessaires pour commencer ou terminer la tâche. Sans une motivation claire et forte, nous sommes plus enclins à remettre la tâche à plus tard.

C'est là qu'intervient un outil puissant : la discipline. Et oui, encore elle. En fait, elle bien souvent essentielle. C'est elle qui va nous permettre de trouver l'énergie pour réaliser nos objectifs. Comment ? En nous en faisant économiser. Ce point étant important, un article entier lui a été consacré. Je vous invite donc à le consulter si cette cause interne de procrastination vous concerne. 


Le perfectionnisme

Lorsque nous avons des attentes irréalistes envers nous-mêmes et que nous cherchons constamment la perfection, nous nous mettons souvent une pression énorme pour produire un travail impeccable. Ainsi, nous pouvons nous retrouver coincés dans un cycle de perfectionnisme, retardant ainsi notre progression.

En effet, il peut entraîner une peur de ne pas être à la hauteur de nos propres standards élevés, ce qui nous pousse à repousser les tâches, dans l'espoir de les accomplir plus tard, lorsque nous serons "prêts" à produire un travail parfait.

Cette cause peut être travaillé en utilisant des techniques de productivité (que nous avons évoquée plus haut concernant "la surcharge de travail". En effet, la surcharge ici est mentale, et les techniques utiliser pour gérer la surcharge factuelles peuvent tout à fait être pertinentes dans ce cas-ci également.

Un travail personnel plus approfondi concernant l'estime de soi et la confiance en soi (le point suivant) sera également tout à fait bénéfique pour travailler sur cette cause de procrastination. 


Une faible estime de soi

Lorsque nous manquons de confiance en nous-mêmes et que nous doutons de nos capacités, nous pouvons avoir tendance à éviter les tâches qui mettent à l'épreuve nos compétences ou qui pourraient potentiellement nous exposer à un jugement négatif (que ce soit le nôtre ou celui d'autrui).

La procrastination devient alors un mécanisme d'autoprotection pour éviter de ressentir un éventuel rejet ou de confirmer nos croyances négatives sur nous-mêmes.

Un travail sur cet aspect (l’estime de soi) et la confiance en soi s’avérera tout à fait bénéfique pour casser le cycle de la procrastination. Pour plus de détail sur les leviers utiles à travailler relatif à l'estime de soi, vous pouvez consulter cet article. 

 

Conclusion

J’espère que les conseils pratiques partagés dans cet article vous aideront à travailler sur le cercle vicieux de la procrastination. Il est important de vous rappeler que cela ne se fait pas du jour au lendemain, mais nécessite du temps, de la patience et une pratique régulière.

Quelque soit la source (externe ou interne) de votre procrastination, il existe des piliers puissants sur lesquels vous pouvez vous appuyer dès à présent pour commencer à casser ce cercle vicieux. En les utilisant quotidiennement, vous pourrez travailler sur la procrastination afin de déployer votre plein potentiel, en développant des compétences psychologiques et comportementales efficaces et saines dans la vie de tous les jours.

 

Pour aller plus loin

Si vous souhaitez approfondir votre travail sur la procrastination ou encore votre parcours d'évolution personnelle, vous pouvez également faire appel à un professionnel.

Dans le cadre d’un travail sur la procrastination, l’estime de soi, la confiance en soi ou encore le perfectionnisme par exemples, les consultations appelées TECC ou TCC (pour thérapies émotionnelles, cognitives et comportementales) ont largement démontré leur efficacité. Elles permettent de mettre en œuvre un travail étayé et approfondi sur le plan émotionnel, corporel, cognitif (pensées limitantes, schémas automatiques...) et comportemental.

 

Céline Gasperini

Psychologue clinicienne

 

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